Message de la présidente de la Fédération des centres sociaux de France

“Chères amies, chers amis,

L’effet loupe de la crise que nous vivons vient, s’il le fallait, éclairer la justesse des constats que les centres sociaux dénoncent depuis longtemps ; car il s’agit bien d’une mise en lumière de ce que chacun voyait. Les plus pauvres, les plus fragiles font plus que tout autre les frais de l’isolement imposé : inégalités scolaires, logements exigus, déserts médicaux, manque d’informations… deviennent aujourd’hui des réalités encore plus criantes. Ne faisons pas semblant de les découvrir !

Et ce ne sont que des préludes, tant les inquiétudes d’une crise économique annoncée sont grandes et probables, supportées là encore, en première ligne par les plus précaires.

Mais, dans la dureté de ce que nous vivons, les raisons d’espérer sont là également.

Plus que jamais, nous le voyons, c’est grâce à l’engagement sans faille de chacun et chacune, qu’il est possible de traverser avec espoir ce temps sidérant que nous peinons à comprendre et que nous avons des difficultés à mettre en perspective.

Que ce soit le dévouement des personnels de santé et de tous ceux et celles qui contribuent à maintenir le fonctionnement de notre société, que ce soit la mobilisation des bénévoles et des professionnels des centres sociaux ou encore le simple respect des consignes et du confinement, chaque geste compte.

Non le lien social n’est pas mort : il reprend vie dans les familles, entre amis, dans le voisinage et en intergénérationnel. Il est exprimé par la sollicitude du personnel des administrations, par le courage des salariés, en dépit de salaires parfois dérisoires, par la formidable mobilisation des associations, des groupements, des collectifs…, pour répondre aux besoins les plus urgents d’une population désorientée.

Les formidables solidarités ainsi exprimées viennent atténuer les effets néfastes de la crise que nous traversons. Elles traduisent les prises de conscience d’un grand nombre que des changements doivent intervenir, que l’occasion est là de repenser nos façons d’être ensemble, de faire société, de réfléchir autrement, de déplacer les lignes, de réapprendre à dire NON.

Les centres sociaux font la preuve à travers toutes les mobilisations locales, à travers l’engagement des bénévoles et des salariés et de tous ceux et celles qui les rejoignent en ce moment, qu’ils sont des acteurs majeurs de lien social et d’actions collectives. Ils démontrent leurs capacités à inventer des nouvelles formes d’intervention et de soutien, ils collaborent à construire un maillage solidaire en particulier dans les quartiers populaires, là où les injustices sont les plus fortes.

Mais s’il y a espoir, il y a aussi incertitude sur nos capacités à la construction d’un nouveau projet de société, plus solidaire, plus juste, plus protecteur.

Notre réseau doit donc se préparer à ce qui suivra le moment aigu de la crise qui peut aussi être dominé par l’expression des incompréhensions et des colères, nous entraînant vers des extrêmes qu’il faudra refuser. Nous aurons à défendre les valeurs qui sont le ciment qui nous lie et qui le fondement de nos actions. La démocratie doit survivre à notre désir d’État, de nouvelles solidarités doivent prévaloir aux rivalités, la reconnaissance de la dignité et de la liberté des personnes est un préalable à toute reconstruction collective.

Oui des choses doivent changer ! Car, nous le voyons bien, constater et dénoncer l’impact des inégalités et ce qu’elles produisent en terme de dysfonctionnements ne suffit pas à faire bouger les lignes. Au-delà des joies que nous aurons à nous retrouver, à nous rencontrer à nouveau, nous aurons ensemble à imaginer des postures, des façons d’agir nouvelles dans une réelle recherche de transformation sociale.

Nous devrons nous dire : comment notre réseau peut-t-il prendre sa part ?

Si nous savons d’ores et déjà que sa place sera au plus près des habitants, nous devons dès maintenant nous interroger sur les façons que nous aurons de relayer leurs attentes, leurs besoins, leurs propositions. Quelle dimension politique pourrons-nous introduire à travers les liens que nous entretenons avec eux mais aussi avec tous ceux qui représentent la « puissance publique » : collectivités, administrations, Etat ?

Nous en faisons l’expérience, agir seul ne suffit pas. Nous pouvons apprécier l’importance du soutien apportés par nos partenaires institutionnels et des dialogues engagés entre réseaux. Demain, quelles seront nos alliances dans les territoires, et au-delà, dans les différents niveaux du réseau afin de nous rendre plus efficaces, collectivement et avec toute la population au regard de ce qui doit changer ?

Nous venons de traverser solidairement une première période où chacun a dû se réorganiser, faire face, bricoler, inventer. Le temps s’étire et nous entrons dans un nouveau temps où il nous faut penser l’avenir.

Je nous invite à le faire ensemble, tout à la fois humblement et fiers de ce que nous sommes”.

 

Claudie Miller, présidente de la FCSF

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